Nous avons beaucoup parlé, dans nos pages, de la distinction entre les professions réglementées et les professions non réglementées. C’est l’un des objectifs de notre site : sensibiliser le public sur le sujet.
Avec notre format triche sur titre, nous avons pu commencer à développer les moyens utilisés par des personnes ne pouvant utiliser un titre réglementé pour essayer d’induire en erreur le public. Mais il existe une autre catégorie de personnes : ceux qui ont la possibilité d’utiliser un titre réglementé, mais qui le trahissent dans leur pratique (charlatanerie, pratiques spirituelles teintées de psychologie, dérive ésotérique, etc.).
Comprendre les limites du système actuel :
En France, pour les psychologues et psychothérapeutes, seul le titre est réglementé. Il s’agit d’ailleurs de l’une des revendications de certains professionnels : protéger la pratique, et non juste l’usage du titre, notamment pour éviter des prétentions de psychothérapie par des personnes n’étant pas psychothérapeutes et n’ayant, parfois, pas l’once d’une formation reconnue ou certifiante en psychologie.
Pour les psychologues, par exemple, le titre est réglementé et les professionnels doivent s’enregistrer auprès des agences régionales de santé qui vérifient le cursus de formation du professionnel ainsi que la validation de la possibilité d’utiliser le titre (document complémentaire aux diplômes et dépendant d’une soutenance face un jury d’universitaires et de professionnels). Suite à cette vérification, le professionnel est répertorié, bénéficie d’un numéro ADELI et peut faire usage du titre. Il est également intégré à l’annuaire santé et peut être recherché/trouvé sur le site dédié. Les autres annuaires (psychologue.net, consultations souffrance au travail etc.) sont liés à des entreprises ou associations et ont leurs critères propres, ils ne garantissent donc pas forcément que le professionnel est bien psychologue par exemple (voir un exemple en cliquant ici).
Un exemple de dérive possible :
Vu que ce système de vérification n’est pas parfait, il existe un certain nombre de professionnels, parmi les professions réglementées, qui choisissent d’utiliser l’assise offerte par leur titre pour trahir leur formation et aller vers des pseudo-sciences et pratiques spirituelles voire ésotériques.
Nous avons pu identifier plusieurs cas dans nos pratiques professionnelles ou via les réseaux sociaux professionnels :
- La personne qui, en tant que coach, psychopraticien ou thérapeute par exemple (professions non réglementées), utilisait des pratiques pseudo-scientifiques, spirituelles voire ésotériques puis réalise un cursus en psychologie pour pouvoir utiliser le titre de psychologue ou psychothérapeute et donner à sa pratique initiale et continuée une assise plus importante, une crédibilité auprès du public, une justification d’apparence scientifique et reconnue à sa pratique qui ne pourtant ne l’est pas.
- La personne qui, pendant un temps, a exercé comme psychologue dans un cadre relativement régulier comme un service hospitalier puis, au bout de quelques années, se met en libéral et remet en question sa formation pour proposer des pratiques pseudo-scientifiques (ennéagrame, MBTI, PNL etc.), spirituelles voire ésotériques (alchimie, chamanisme, néo-chamanisme, magnétisme, thérapie par le tarot, vibrations, thérapie énergétique, « nouvelle psychologie », « psychologie de l’âme », accès au monde ou au soi céleste etc.) tout en continuant de faire usage du titre professionnel de psychologue.
Pour les personnes en détresse, qui généralement sont visées par leur communication (perte de sens, besoin de trouver son vrai soi, sa vraie identité, sentiment de ne pas être compris ou entendu par l’entourage ou le monde médical ou psychothérapeutique, etc.), toute technique semble parfois « bonne à essayer », surtout dans un système où la prise en charge psychologique est compliquée (difficile remboursement, délais d’accès à un psychothérapeute, déserts médicaux, protocoles remboursés par l’assurance maladie peu utiles sur le long terme etc.). Mais cela peut faire des dégâts (perte de chance ou augmentation du délai de rétablissement, perte d’argent, errance thérapeutique, dérives sectaires etc.). Et nous estimons que les psychologues, psychothérapeutes et psychiatres ont une responsabilité et un rôle à jouer sur ce sujet.
Quelques points de vigilance :
Nous ne pouvons qu’alerter le public face à ces professionnels. Notre objectif est de sensibiliser, inviter à la vigilance et amener chacun à faire un choix libre et éclairé concernant les professionnels vers lesquels il se tourne.
Tant que l’exercice de la psychothérapie (et d’autres pratiques de la psychologie, si l’on est réaliste, car les autres champs d’exercice des psychologues sont aussi touchés : expertise légale, psychologie du travail, psychologie du développement de l’enfant, neuropsychologie, etc.) n’est pas réglementé, soyons vigilant :
- Si un professionnel a un titre réglementé, cela doit vous rassurer sur sa formation initiale mais ne suffit pas forcément.
- Un titre réglementé ne cautionne pas des pratiques pseudo-scientifiques, spirituelles ou ésotériques. Si je suis psychologue, mon titre de psychologue ne garantit pas que les pratiques énergétiques ou chamaniques que je prétends réaliser sont validées par les psychologues ou par l’état des connaissances scientifiques en psychologie. Si les pseudo-sciences peuvent être plus difficiles à identifier pour le public (notamment à cause des livres sur ces théories et pratiques, largement diffusés et mis en avant dans des rayons « psychologie » ou « santé et bien-être » de librairies), les pratiques spirituelles ou ésotériques sont plus faciles à identifier et doivent vous alerter.
- La pratique du psychologue, du psychiatre et du psychothérapeute doit être basée sur l’état actuel des connaissances scientifiques. La formation initiale de ces professionnels offre un bon socle sur le sujet en termes de connaissance, de méthodologie et d’accès à l’information. Il est possible et probable que l’état des connaissances évolue entre la formation initiale que le professionnel a eu et la pratique qui est la sienne 10 ou 20 ans ensuite. Le professionnel doit avoir pu se maintenir à jour. Mais l’évolution des connaissances ne prend pas la forme d’une remise en question, souvent radicale, de connaissances et pratiques ayant un fondement scientifique jugées « conformistes et froides » au profit de pratiques intuitives et spirituelles présentées comme « humaines » ou « nouvelles ».
- Si un professionnel tient un discours remettant en cause sa formation scientifique, soyez alerté.
- S’il tient un discours qui vous apparaît ésotérique, douteux, spirituel (par exemple en évoquant l’âme, le monde céleste etc.), soyez alerté.
- S’il justifie ses pratiques pseudo-scientifiques, spirituelles ou ésotériques par « la demande du public », soyez alerté. Le psychologue, le psychothérapeute et le psychiatre sont responsables et garants de leurs pratiques et de leur impact potentiel.
- S’il semble qu’une dérive sectaire est possible (par exemple avec un discours spirituel amenant à s’éloigner de ses proches, de son contexte social qui serait la cause des maux de la personne), n’hésitez pas à alerter la MIVILUDES et l’agence régionale de santé pour les informer de la situation et éventuellement recueillir leur retour et leurs conseils.
Face aux dérives, charlataneries, tromperies, soyons tous vigilants.
Mise à jour le 03.06.2024 : Désormais, les psychologues n’ont plus de numéro ADELI mais un numéro RPPS. Nous vous invitons donc à vérifier les numéros RPPS pour les psychologues et psychiatres ou les numéros ADELI pour les psychothérapeutes.