Quel est le titre du livre ? | Pennycook, G. ; Cheyne, J. A., Barr, N., Koehler, D. J., Fugelsang, J. A. (2016). De la réception et détection du baratin pseudo-profond (traduit par C. Lucchese). Zones sensibles. |
Quel est le sujet du livre ? | Ce livre propose l’article « On the reception and detection of pseudo-profound bullshit » rédigé par Gordon Pennycook et ses collaborateurs, psychologues, docteurs et chercheurs en psychologie, et initialement publié dans la revue Judgment and Decision Making en 2015. Il est ici traduit en version française. Dans cet article, les auteurs définissent le baratin pseudo-profond (un propos énoncé sans considération pour la vérité et dont l’apparente profondeur vise à impressionner plus qu’à informer) et le distinguent de concepts pouvant être confondus avec lui comme le mensonge (qui lui prend en considération la vérité). Ensuite, ils proposent de s’intéresser aux variables pouvant potentiellement expliquer les différences de réceptivité à l’échelle individuelle : le style de pensée (analytique ou intuitif), les confusions ontologiques (erreurs catégorielles amenant à confondre ce qui est littéral ou métaphorique par exemple) et les croyances épistémologiquement suspectes (croyances entrant en conflit avec des conceptions du monde généralement admises : croyances paranormales, idéations conspirationnistes etc.). Ces variables seront testées dans leurs études avec d’autres facteurs tels que les aptitudes cognitives. Quatre études sont après détaillées par les auteurs (objectif, population, méthodologie et résultats) puis discutées. Ces études exposaient des individus à des énoncés de baratin pseudo-profonds qu’ils devaient ensuite évaluer ou non profonds, les participants répondaient à d’autres échelles pour vérifier si certaines variables pouvaient expliquer la sensibilité à ce type de baratin. Au fil des études, la méthodologie était améliorée et complétée pour vérifier et affiner les résultats. Elles ont permis d’ébaucher une méthodologie et un outil afin d’étudier le baratin pseudo-profond. => Les résultats de ces premières études montrent une tendance générale à attribuer de la profondeur aux énoncés. Ils montrent également que les personnes qui sont plus réceptives au baratin présentent les caractéristiques suivantes : elles sont moins réflexives, démontrent des aptitudes cognitives plus faibles (intelligence verbale et fluide, aptitude au calcul) et sont plus sujettes aux confusions ontologiques, à l’idéation conspirationniste, aux croyances religieuses, aux croyances paranormales et à la croyance en la médecine alternative. => Les auteurs ont ébauché une mesure de « sensibilité » au baratin pour essayer de comprendre pourquoi certaines personnes étaient plus aptes à détecter le baratin. Cette sensibilité au baratin est associée à de meilleures performances en pensée analytique et à une croyance paranormale plus faible. Il n’y avait cependant pas de lien, contre toute attente, avec les résultats concernant l’idéation conspirationniste ou l’adhésion aux médecines alternatives et complémentaires. Les auteurs expliquent cela par une combinaison de mécanismes cognitifs (biais de réponse ET détection de conflits) mais invitent à réaliser d’autres études pour confirmer ces résultats. Développer sa sensibilité au baratin, prendre le temps de rechercher le sens ou d’analyser le sens des mots, développer son intelligence verbale (sens des mots, subtilités lexicales) pourrait favoriser l’esprit critique et circonscrire les jugements de profondeur face à des propos relevant du baratin pseudo-profond. => Au final, les auteurs invitent à continuer les recherches, notamment pour mieux comprendre les processus cognitifs en jeu ainsi que les variables contextuelles qui interagissent avec les différences individuelles dans la réception et la détection du baratin. En complément : – Une remarque rédigée par Craig Dalton (« Bullshit for you ; transcendence for me. A commentary on « On the reception and detection of pseudo-profond bullshit ») parue dans la même revue est publiée. Elle remet en cause l’étude des auteurs en expliquant qu’il peut exister un biais culturel dans le matériau utilisé (une phrase paraissant baratin pour un occidental pourrait être profonde et amener à la transcendance un oriental, en substance). Il explique aussi pouvoir réfléchir et trouver un sens à plusieurs citations, pas pour d’autres. – La réponse des auteurs à la remarque (« It’s still bullshit : Reply to Dalton ») est ensuite présentée. En substance, ils rappellent que le baratin se définit par le fait qu’il est produit sans considérer la vérité. Leur matériau répond à cette définition (génération aléatoire mais syntaxiquement correcte), et le fait que certains puissent les trouver profonds ou sensés n’empêche pas que ce soit du baratin. L’accord des différents auteurs de l’article et de Craig Dalton a été recueilli par Zones sensibles pour cette publication française. |
Qu’a-t-on particulièrement aimé ? | Nous avons apprécié la présentation de cette thématique, la clarté des propos (pour des universitaires ou des personnes acceptant ce type de présentation) ainsi que la présence d’une bibliographie. Nous pensons en outre cette thématique importante car un certain nombre de charlatans utilisent ce baratin pseudo-profond dans leurs démarches. Comprendre ce qui rend le public réceptif à ce baratin, voire favorable à celui-ci en lui attribuant une profondeur inexistante, et comprendre ce qui pourrait favoriser la détection et l’esprit critique face à ce baratin nous semble donc être un sujet potentiellement prometteur. |
Considère-t-on qu’il puisse s’agir d’un livre de référence sur sa thématique ? | Non. |
Sinon, pourquoi ? | Il n’offre pas une approche assez exhaustive de la question, et cela n’était d’ailleurs pas l’objectif des auteurs de l’article initial. Ils se focalisent sur les variables individuelles rendant sensible au baratin pseudo-profond. La dimension sociale, voire sociétale, évoquée par les auteurs dans l’article comme nécessitant des études complémentaires, nous semblerait importante pour un livre de référence. De plus, le langage, bien qu’accessible pour un public averti, pourrait rebuter le grand public. C’est finalement assez logique car il s’agit d’un article scientifique publié initialement dans une revue mais traduit et édité en livre. |
A quel public le conseillerions-nous ? | Les étudiants et enseignants en psychologie, les psychologues. Les étudiants et enseignants en sociologie, les sociologues. Ils pourraient notamment apporter leur expertise à cette thématique. Toute personne intéressée par la thématique et prête à accepter un format et un langage d’article scientifique. => Cela peut notamment intéresser les personnes travaillant dans certains domaines plus exposés au baratin pseudo-profond (innovation, ressources humaines, qualité de vie et des conditions de travail, santé, développement personnel …). |