Après avoir évoqué les professions réglementées et non réglementées, et vous avoir davantage conseillé le recours à des professionnels réglementés, nous souhaitons vous appeler à la vigilance et à l’esprit critique concernant des stratégies parfois utilisées par les professionnels pour se distinguer :
Le docteur n’est pas forcément médecin |
On peut réaliser une thèse de doctorat, et donc se dire docteur, dans d’autres domaines que la médecine. Nous utiliserons donc sur ce site « docteur en psychologie », par exemple, pour présenter certains auteurs. Quand il s’agit de médecins, nous le préciserons en citant leur spécialité (par exemple, psychiatre). Mais il convient donc de ne pas penser qu’un « docteur en psychologie » est un psychologue qui serait en plus médecin. |
Le doctorat n’est pas un super pouvoir |
Être docteur en psychologie (donc avoir réalisé un doctorat en psychologie) ne signifie pas être psychologue ou « super psychologue ». Certains psychologues réalisent un doctorat pour se spécialiser dans une thématique, mais il existe également des doctorants et docteurs en psychologie qui n’ont pas le titre de psychologue (ni même une formation de type de licence + master en psychologie) mais se destinent à d’autres carrières en se spécialisant sur une thématique en lien avec la psychologie : conférencier, consultant, enseignant chercheur, etc. Par exemple, si après un master en management des organisations publiques je réalise un doctorat en psychologie sur l’insertion socioprofessionnelle des personnes ayant un trouble du spectre autistique, je ne suis pas psychologue ni psychologue ou psychothérapeute spécialisé en autisme. En revanche, je suis docteur en psychologie et pourrai éventuellement me lancer dans une carrière de formateur ou conférencier pour partager mes connaissances de haut niveau, réelles, sur cette thématique précise à l’aide de mes compétences transversales, réelles, développées durant mon doctorat. Cette précision peut être utile dans la mesure où le doctorat en psychologie est parfois utilisé à des fins marketing (livre par le Dr. X., formation par le Dr. Y.) par des personnes n’étant pas psychologues ni psychothérapeutes pour vendre des livres ou produits pourtant en lien avec des pratiques comme la psychothérapie, et parfois même sans lien avec le sujet de leur thèse de doctorat. En revanche, si le sujet de thèse et donc la thématique d’expertise est en lien avec l’activité ou le produit du professionnel, cela peut servir à orienter les usagers ou patients, comme lorsqu’un psychologue a réalisé une thèse sur le syndrome de l’imposteur et réalise des consultations de psychothérapie spécialisées sur le sujet, ou lorsqu’un psychologue a réalisé une thèse sur la perception du risque environnemental puis devient consultant sur cette thématique. De plus, pour les organisations, les titulaires d’un doctorat peuvent apporter certaines compétences transversales utiles notamment en gestion de projets, analyse de données, valorisation des recherches et projets etc. En conclusion, nous vous invitons donc non pas à rejeter les titulaires d’un doctorat mais à questionner la congruence entre leur expertise et la thématique pour laquelle vous les sollicitez. |
Les limites des certifications |
Certains professionnels mettent en avant des certifications (comme par exemple Europsy). Nous vous invitons à vous rendre sur le site des associations qui les réalisent pour voir ce que ces certifications signifient, et à garder en tête le caractère volontaire de cette certification (les certifications ne permettent donc pas de comparer les psychologues entre eux mais de vérifier, en fonction des critères de l’association qui certifie, les prérequis remplis par le professionnel les mettant en avant). |
Les limites des annuaires de professionnels |
Certains professionnels mettent en avant leur inscription sur des annuaires (association de psychanalystes, AFTCC, consultations Souffrance & travail etc.). Nous vous invitons à vous rendre sur le site des associations pour voir les critères qu’elles mettent en œuvre pour choisir qui elles répertorient dans leur annuaire, et à garder en tête le caractère volontaire de cette démarche. Ainsi, gardez en mémoire que tous les psychologues cliniciens ne sont pas inscrits dans des annuaires associatifs, que d’autres professionnels que ceux listés sur le site Souffrance & travail réalisent des consultations pour des personnes en situation de souffrance au travail etc., mais que ces annuaires listent des professionnels qui ont choisi de s’inscrire et qui remplissent les critères donnés par l’association. Méfiez vous des annuaires qui vérifient peu d’informations sur les personnes recensées (par exemple, psychologue.net malgré son nom ne répertorie pas que des psychologues mais beaucoup de psychopraticiens et ne semble pas vérifier certaines informations comme les numéros RPPS et ADELI déclarés au regard de situations que nous avons pu identifier). |
Un regard critique sur les publications et les livres |
Certains professionnels mettent en avant des publications dans des revues ou le fait qu’ils ont écrit des livres qui se trouvent dans le commerce. Le problème est que le public ne différencie pas les publications dans des revues scientifiques avec évaluation par les pairs (des spécialistes du domaine traité par l’article jugent avec un regard critique cet article, sa méthodologie etc. avant de valider une publication) et les revues sans évaluation par les pairs. Il ne différencie pas non plus les revues scientifiques des revues grand public parlant de sciences. Enfin, il ne connait pas forcément les différences de spécialité entre les maisons d’éditions, les collections ou ne connait pas les critères retenus par les maisons d’édition pour choisir ou non d’éditer un livre ou créer une collection. Ainsi, la hiérarchisation de ces formes de publication n’est pas la même si l’on est scientifique ou si l’on fait partie du tout public, si l’on connait la discipline concernée et donc les revues pertinentes ou si l’on est profane. A ces considérations peuvent s’ajouter d’autres problèmes comme les revues prédatrices (pour faire simple, des revues de faible qualité qui publient facilement des articles, sans réel travail éditorial, si l’on paye, souvent cher, pour les faire publier, ce qui permet de mettre en avant de nombreux articles publiés qui auraient ou ont été refusés ailleurs …) ou les personnes qui parviennent à éditer, en auto-édition ou via une maison d’édition, des livres éloignés de leur domaine d’expertise en utilisant pourtant leur titre (par exemple, si je suis docteur en psychologie avec une thèse sur les valeurs et l’orientation professionnelle, une pratique de consultant en évolution professionnelle, mais que j’utilise mon doctorat comme argument pour vendre un livre que je rédige sur les conflits familiaux, la psychothérapie ou les troubles du comportement alimentaire). Pour conclure sur ce sujet, nous ne dévalorisons pas les publications dans des revues, y compris les revues de vulgarisation, ou la capacité pour un professionnel à faire éditer un livre, nous comprenons que beaucoup y voient une reconnaissance mais nous vous invitons donc comme toujours à garder une réflexion critique sur le sujet. |
Une méfiance concernant les fonctions d’enseignement |
Enfin, certains professionnels utilisent un titre universitaire ou une fonction d’enseignement (professeur des universités, professeur à l’université, maître de conférences, enseignant à l’université, enseignant en école ou institut etc.). Nous avons pu identifier deux principaux écueils à ce sujet. Le premier est que le public ne maîtrise pas les subtilités de ces titres ou fonctions et peut confondre une personne qui intervient 2h en tant que professionnel pour témoigner de sa pratique lors d’une unité d’enseignement dédiée à ces « ouvertures sur le monde professionnel » dans un cursus universitaire et un professeur des universités, un maitre de conférences ou un attaché temporaire d’enseignement et de recherche. Or les prérequis, modalités de nomination et fonctions diffèrent, donc les compétences et profils attendus aussi. En outre, ces prérequis diffèrent en fonction des pays et la comparaison n’est donc pas aisée. Le second écueil est de considérer le fait d’enseigner, de façon générale, comme une preuve de compétence pour la thématique spécifique pour laquelle on souhaite consulter le professionnel. Or, pour citer un exemple, enseigner les stades de développement de l’enfant selon les théories de Jean Piaget dans un Institut National Supérieur du Professorat et de l’Education ne fait pas nécessairement du professionnel un meilleur psychothérapeute concernant des problématiques anxieuses ou des conflits familiaux par exemple. Enseigner les connaissances actuelles sur le fonctionnement de la mémoire dans une unité d’enseignement en psychologie cognitive à l’université ne démontre pas une compétence supérieure en recrutement prédictif, en accompagnement des changements organisationnels ou en prise en charge de la souffrance au travail. Les exemples pourraient se multiplier et, loin de nous l’idée de dénigrer ces fonctions d’enseignement, nous vous invitons surtout à garder un recul critique lorsqu’elles sont mises en avant. |